Notre arrivée en République tchèque s’est déroulée sous un agréable soleil. Il est 7 heures du matin, et après cette nuit passée dans notre tente, nous rangeons nos affaires pour parcourir le dernier village qui nous sépare de la Tchéquie !

Nous sommes directement pris en voiture par un étudiant qui nous dépose dans la première ville tchèque de notre voyage, la petite Velké Bílovice, dans le district de Břeclav.

Nous entrons dans un supermarché pour trouver à manger, et tombons des nues quand nous voyons le prix du kilogramme de banane en promotion : 60 €.

« Mais qu’est-ce que… »

Nous réalisons et avions oublié que la République tchèque, bien que faisant partie de l’espace Schengen, n’utilise pas l’euro ! Nous voilà rassurés. Dans ce pays, les bières sont moins chères que l’eau. Nous parcourons les rayons et découvrons avec stupeur des bouteilles de 2 litres de bière pour quelque 20 couronnes tchèques, soit moins de 1 euro !

Nous reprenons la route en direction de Němčičky, prononcé « Nièmtchitchki » lieu de rencontre de notre prochaine ferme située à 20 minutes en voiture.

Une voiture s’arrête. Un homme et sa femme, la quarantaine, s’arrêtent et nous invitent, gros sourire aux lèvres et vociférant un anglais très « tchèque », à monter dans leur voiture. Nous nous exécutons et bouclons notre ceinture. Je lui lance :

– Nous allons à Němčičky, dans cette direction !

Il rigole et s’esclaffe :

– C’est génial ! Nous y allons aussi avec ma femme ! Nous allons goûter du vin dans une ferme là bas !

– Et bien nous, nous allons bosser dans une ferme viticole justement !

– Ça alors ! Quel heureux hasard ! Bienvenue en Tchéquie les amis, je suis Rostislav et voici ma femme Jane !

Nous avançons et découvrons avec stupeur les paysages de la Moravie du Sud. Des vignes, que des vignes. Les paysages vallonnés sont en effet propice à la culture du vin, en hiver les collines bénéficient d’un microclimat qui empêche le gel du sol, ce qui en fait une région principalement appréciée pour sa viticulture.

Arrivés près de Němčičky, Rostislav s’arrête, se retourne et nous fixe.

– Mes amis, nous aimerions vous inviter à participer à une dégustation d’alcool d’amande qui se déroule à Hustopeče, à 20 minutes d’ici. Si ça vous dit, nous y allons et nous vous ramenons à Němčičky après !

Nous acquiesçons sans hésiter. Découvrir les cultures locales et faires des rencontres imprévues, c’est un des atouts de l’autostop et c’est le principe même de notre voyage !

À Hustopeče, nous descendons tous de la voiture et démarrons une petite randonnée parmi les amandiers, une des cultures locales de la Moravie du Sud. Après 30 minutes de marche, nous arrivons au sommet d’une colline bondée de centaines de personnes, une dégustation s’y déroulant, les locaux s’y rendent en grand nombre pour découvrir de nouvelles saveurs.

Nous sommes invités à goûter à ce fameux alcool, un délice titrant à 45 degrés dont la délicate saveur d’amande chatouille le palais et la gorge pendant plusieurs dizaines de minutes.

Nous continuons la randonnée à travers de petits chemins formant une boucle qui nous ramène à la voiture 30 minutes plus tard.

Rostislav est commercial, et en tant qu’épicurien, il aime découvrir et goûter de nouvelles saveurs, motif de sa visite en Moravie du Sud. Il espérait pouvoir voir les amandiers en fleurs, mais le froid tardif annihilera ses espoirs. Il se confiera à nous quant à notre condition de français :

– Vous les Français, vous êtes toujours heureux. Vous souriez tout le temps, rien ne vous choque, vous avez même cette fameuse expression que vous aimez dire quand vous êtes heureux : « ALALALA ».

Après une belle crise de fou rire avec Sehriban, nous lui expliquons qu’il s’agit ni plus ni moins d’un cliché et que bon nombre de Français ne sont pas forcément joyeux, qu’il y a des gens heureux et d’autres moins, comme partout. D’ailleurs, le « ALALALA » est plutôt utilisé à titre péjoratif, en tout cas me concernant.

D’autres rires viennent s’ajouter quand nous entendons plusieurs fois Rostislav dire le mot anglais « Together » qu’il prononce « Tagada ».

Nous sommes déposés vers 15h00 à Němčičky directement dans la ferme de Richard, qui devait nous accueillir dans l’après-midi. Nous sonnons et personne ne répond. Rostislav appelle le téléphone de Richard inscrit sur la sonnette en cas d’absence, problème : Richard a eu un contretemps et ne sera de retour que le lendemain.

Rostislav ayant décidé de nous aider quoiqu’il arrive, il prend l’initiative d’aller sonner chez la voisine d’en face, malgré nos remerciements et nos invitations à nous laisser nous débrouiller pour la nuit avec notre tente. La voisine lui explique que le père de Richard possède un appartement vide dans lequel nous pourrions être logés ce soir. Appartement qui s’avèrera être celui que nous utiliserons toute la semaine pour travailler dans la ferme.

Il obtient le numéro de téléphone de Jaroslav, le père de Richard, qui annonce pouvoir nous accueillir avec plaisir pour la soirée. Nous sommes déposés devant une école où se trouve le père de Richard, et Rostislav nous sourit une dernière fois en nous souhaitant bon courage pour la suite, avant de s’en aller en voiture.

Le père de Richard nous apparaît immédiatement comme quelqu’un d’incroyablement accueillant et chaleureux. Il ne parle pas un seul mot d’anglais, mais nous nous comprenons immédiatement. Les seuls mots qu’il utilise sont « Dobre, dobre » (c’est bon, c’est bon, tout va bien). Il nous pousse pour nous inviter à le suivre et nous fait entrer dans la cour de l’école où se déroule une fête pour célébrer l’installation d’un nouvel orgue dans l’église du village.

Le père nous présente à tout le monde, nous sommes gênés, car nous ne comprenons pas un seul mot et il semble faire l’éloge de notre périple à toutes les personnes qu’il croise. Il nous offre à manger notre premier repas tchèque : un goulash fait maison et une grande bière brassée locale !

Nous sommes abasourdis par tant d’hospitalité et bousculés de gauche à droite par le père qui souhaite nous faire découvrir avec son éternel et immense sourire, toutes les spécialités et traditions du village. C’est ainsi que nous voyons en direct la décoration des œufs et les différentes étapes des traditions locales de Pâques.

Nous apprenons que la République Tchèque, en dépit du fait de compter énormément de Chrétiens (surtout en Moravie du Sud) est également le pays comptant le plus grand taux d’athées au monde. Ici, ce n’est pas le cas : Tout le monde est croyant et s’atèle à ses traditions chrétiennes.

Nous rencontrons Jan, le frère de Richard, qui est œnologue et nous fait déguster de nombreux vins tout aussi délicieux les uns que les autres.

Impossible d’y échapper : On nous sert du vin TOUT le temps !

La fête terminée, le père nous invite à rejoindre notre appartement, nous habiller, et venir les aider pendant une petite heure dans les vignes avant d’aller manger chez lui.

Nous nous préparons donc et rejoignons Jaroslav et sa femme Jamila qui nous conduisent dans les hauteurs de leurs terres pour commencer à tuteurer quelques jeunes pieds. Un travail vraiment drôle, car nous fonctionnons en binômes, Jaroslav avec moi, Sehriban avec Jamila, et c’est au groupe qui va le plus vite sur sa rangée, une sorte de course en somme !

Le vieux couple se chamaille en rigolant, et c’est vraiment agréable de voir tant de bonheur dans leurs yeux, après toutes ces années passées ensemble.

À la fin de l’heure, le vieux couple nous invite à manger chez eux, un délicieux et copieux repas. Nous utilisons en plus des signes de mains, l’application google traduction pour discuter et traduire instantanément avec une remarquable précision les phrases de chacun, et ce, vocalement, et arrivons à discuter toute la soirée. Merci la technologie !

Jaroslav nous fera visiter toute la ferme, ses cachettes « secrètes » où ils stockent leurs vins d’exceptions, les vieilles bouteilles, leur système de fabrication, leurs terres personnelles, la terre partagée de ses fils, etc.

Les vignes, principale activité de la Moravie du Sud

Nous apprenons également qu’il est le détenteur du record mondial inscrit au guiness book du plus grand tressage de bois de saule, tradition locale pour les fêtes de Pâques. 67 mètres de tressage qui repose accroché sur les murs d’une grange.

Repus et fatigués de cette journée, nous rejoignons notre appartement pour nous reposer : un grand appartement privé avec un magnifique stove à bois en son milieu !

Le lendemain matin nous rencontrons Richard : une copie conforme de son frère Jan, un peu plus âgé et grisonnant. Je sens tout de suite une personne bridée par quelque chose. Il ne semble pas dans son assiette, froid, mais ne semble pas coutumier de cet état.

Nous travaillons pendant la semaine, et apprenons à nous connaitre. Des soucis d’ordre familial viendront confirmer nos pensées, Richard est actuellement en prise avec ses démons et doit les gérer tout en continuant à travailler dans ses vignes. Nous tentons de lui changer les idées en l’invitant à nous rejoindre dans l’appartement le soir.

Il est une chose compliquée dans une ferme viticole : esquiver le vin. On vous en sert matin, midi, soir, la nuit, entre les repas, tout le temps. Richard nous rejoint le soir accompagné de 3 bouteilles d’exception fraîchement sorties de sa collection personnelle.

Des vins, il en a de tout âge, et aussi des très vieux !

Ce soir-là…je ne m’en souviens plus trop, tout ce que je sais, c’est que j’ai trop bu, clairement trop bu. Même Sehriban qui n’est pas une grande buveuse d’alcool et encore moins de vin, n’a pas su dire non à 6 verres. Merci Richard pour ce mal de crâne le lendemain ! (rires)

Richard est un ancien grand voyageur. Il ne s’entend pas très bien avec son frère et pour cause : ils travaillent en compétition. Ils ont chacun leurs terres, chacun leur spécialité, et Richard ne supporte pas que son frère (sacré numéro 1 en Moravie l’année passée) ajoute des additifs dans son vin, là où lui préfère personnellement proposer un vin le plus naturel possible. Les tensions sont palpables !

Nous inviterons pendant la semaine, toute la famille de Richard à venir déguster un repas typiquement français, après avoir longuement bataillé pour trouver les ingrédients nécessaires à la confection de ces plats  ! C’était nouveau pour eux, et ils ont adoré, un point pour la France !

Une quiche lorraine, une tarte aux pommes et un gâteau au chocolat, quoi de plus Français ?

Richard nous invitera à goûter chez lui ses plus exceptionnels alcools, parmi lesquels des rhums de 30 ans d’âge, son cognac fait maison, le « STAVEKniak » de 1998, du calvados de 1985, et beaucoup d’autres vins tout aussi incroyables. Nous regretterons de ne pas avoir le palais assez fin et travaillé pour apprécier ces délices à leur juste valeur.

On croirait un fond de cale de pirate !

Tailles de vignes, tuteurage, aération du sol, labellisation des bouteilles en passant par l’épandage de matière organique, nous aurons vu beaucoup de choses sur le fonctionnement viticole morave, à fortiori dans cette ferme de qualité !

Le dernier samedi, nous sommes invités par les parents de Richard à participer à la fête de préparation de Pâques : la confection d’une des plus grandes spécialités Tchèques : Le Trdlo. Cette pâtisserie typiquement tchèque consiste à enrouler une pâte sucrée autour d’un support en bois de forme conique, de le badigeonner d’œuf, de le rouler dans des brisures de noix, le cuir au feu de bois en tournant à la manière d’une broche, puis le rouler dans un sucre glace. Un réel délice.

Préparation des traditionnels Trdlo (ou Trdelník) tchèques !
Les Trdlos ne se cuisent qu’au feu et en tournant la broche, tradition oblige !

Nous participerons également à la confection des œufs et de ses motifs : ils plongent des œufs de poules sur lesquels sont collées des herbes et des feuilles dans une marmite remplie d’eau bouillante et de peaux d’oignons, ce qui colore les œufs tout en découvrant les motifs des herbes.

Décoration des œufs pour préparer la fête !

Nous assisterons également à la confection de cravaches pour la préparation d’une tradition tout à fait étonnante : A Pâques, en Tchéquie et même en Slovaquie, des rameaux de saule sont coupés pour être tressés entre eux et créer un fouet. (le fameux record mondial détenu par Jaroslav) Ce même fouet sera utilisé le jour de pâques pour « fouetter » doucement les femmes de leur cœur dans la rue. Dans la tradition, il est dit que les femmes touchées par ces derniers resteront jeunes et fraîches. Le lundi de Pâques est également appelé le « Lundi des fouets. »

L’important pour les hommes n’est pas tant de ravigoter les bonnes femmes, mais plutôt de profiter de la récompense qui suit ! En effet, alors que les hommes « donnent un coup de jeune » aux femmes, ils récitent un chant de Pâques dans lequel ils demandent une récompense. Pour les coups de fouet assénés, les enfants reçoivent généralement des œufs de poule colorés ou des sucreries. Les jeunes reçoivent de l’argent, et les plus vieux un verre de Slivovitz, du schnaps aux prunes local, et tous peuvent manger des pains garnis ou des pâtisseries. Et dans l’après-midi, on croisera les hommes titubant à travers tout le village.

La tradition en elle-même n’est pas le plus étrange. Ce qui l’est pour moi, c’est de me dire que les hommes imaginent donc « fouetter » une femme qui restera jeune, quand lui-même continuera de vieillir. Un vieux de 90 ans avec une jeunette de 20 ans, qui l’eut cru !

Préparation des fouets en saule (ici un géant)

Nous quittons la ferme le dimanche matin après d’émouvants adieux envers cette petite famille qui nous manquera beaucoup. Jamila accrochera un ange à la fenêtre après nous avoir bénis pour que la chance soit avec nous pendant notre long voyage.

Nous sommes prêts à lever de nouveau nos pouces, fatigués de cette semaine « alcoolisée » ! Nous avançons en direction de Brno, deuxième plus grande ville de Tchéquie, où nous accueille Juraj pour deux jours via Couchsurfing.

Nous visitons la ville de Brno en compagnie de notre hôte, et pour une fois, en dépit que je ne sois pas un fanatique des grandes villes, c’est une très agréable surprise. De loin, la ville est une horreur pour moi. J’ai de toute façon du mal à trouver une quelconque beauté envers des cheminées d’usine qui sont légion dans cette ville. Mais à l’intérieur, c’est une autre histoire. Les rues sont larges, des églises aux architectures tout aussi diversifiées les unes que les autres et bien que je ne sois pas croyant, j’ai toujours beaucoup de plaisir à visiter une église, ébloui par ce que l’homme est capable de bâtir.

Les églises, des prouesses architecturales

La ville est parsemée de très vieux bâtiments assortis de nuances camaïeux très colorés. Cette ville est un plaisir…mais j’ai besoin de vert. Après une longue promenade dans toute la ville, nous décidons avec Sehriban d’aller voir les célèbres Punkva Caves, des grottes naturelles situées à 45 minutes au nord de Brno. Nous dormons le soir chez Juraj et partons au petit matin, allégés de nos sacs, en direction de Blansko que nous rejoignons d’une traite avec cette incroyable chance : nous arrêtons une voiture qui doit se rendre exactement au même endroit que nous, et qui accepte même de nous ramener après l’excursion. Quel heureux hasard. Merci le stop !

Arrivés sur le lieu, nous nous enfonçons dans des forêts à l’apparence très sauvage et préservées, parsemées de rivières et de formations rocheuses vraiment magnifiques. Après 3 kilomètres de marche, nous arrivons enfin près des grottes. Les mots ne seraient pas assez puissants pour décrire l’énergie qui circule en ces lieux. Des grottes formées de stalactites, de reliefs et dessinées par l’eau pendant des milliers d’années…

Merci dame nature pour ce spectacle…
Quand terre et ciel se rencontrent…
Petit coin de paradis sur terre…

Après 2 heures passées à scruter les moindres recoins de ces grottes, nous rejoignons nos conducteurs qui nous déposent à Brno à Midi, ce qui nous permet de nous promener jusqu’au soir et découvrir la ville plus en détail. Nous croiserons presque à chaque coin de rue des hommes parés de leurs fouets de saule, certainement à la recherche d’une demoiselle à cravacher.

Nous reprenons la route le lendemain matin en direction du pays voisin : La Slovaquie, et qui l’eut cru : cette journée s’annonce être la plus compliquée du voyage pour le stop.

3 heures d’attente pour qu’une voiture daigne nous prendre le long d’une route de campagne en direction de Trnava. Nous sommes lâchés de village en village, après le cuisant échec d’avoir tenté de rejoindre l’autoroute à pied.

Il est 17h00 et nous nous trouvons actuellement à 45 minutes de Trnava, la plus vieille ville de Slovaquie. Impossible de trouver une voiture de nouveau. Littéralement, la recherche de la première et la dernière voiture de la journée aura été un vrai calvaire.

Calvaire si long et épuisant que nous décidons de baisser nos pouces pour chercher un endroit où poser notre tente, la nuit étant sur le point de tomber.

Comme si quelqu’un avait entendu notre appel, nous voyant baisser les bras, une voiture s’arrête et c’est une véritable providence qui s’annonce : le jeune homme se rend à Trnava !

Ce soir, nous dormons au chaud, et en Slovaquie !

Petite vidéo de notre passage en République Tchèque :

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8 Comments

  1. L’intérieur des églises semble magnifique ! Je suis assez fan de l’architecture des lieux religieux. Peu de moyens pour d’aussi belles constructions !

    • Terence Reply

      Oui très peu de moyen !
      Les églises de tchequie sont vraiment somptueuses!

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